Certains de nos décideurs auraient tendance à penser et· affirmer (confère, ne suivez pas mon regard, Notre Président à Dakar en 2007) que l'Homme africain (je savais pas qu'il n'y en avait qu'un), selon la bonne vieille tradition post-coloniale décomplexée à la française, vivrait dans un temps pré-moderne, qu'il ne serait jamais réellement entré dans l'Histoire, tout à son éternelle répétition d'un présent englué dans une tradition contraire à l'idée même du progrès.
Ouais.
La compilation Shangaan Electro, sortie voilà quelques temps déjà par le délicieux label anglais Honest Jons, représente une chouette occasion parmi d'autres de clouer le bec aux guignols racistes incapables de se représenter un horizon culturel différent de l'hégémonie occidentale en vigueur. Le peuple Shangaan, ou Tsonga, qui représente une population d'environ deux millions d'individus a historiquement vécu dans une aire s'étendant du Sud du Mozambique au Nord de l'Afrique du Sud, mais beaucoup d'entre eux vivent et travaillent aujourd'hui dans les townships de Johannesburg.
La compilation qui nous occupe regroupe et propose une sélection de morceaux produits par une figure centrale de la scène, Nozinja (qui joue également sous le nom de Dog). Producteur donc, sorcier de studio, dénicheur de talents, chanteur, s'occupant d'un label qu'on pourrait qualifier de DIY (il grave et sérigraphie lui-même ses sorties), le bonhomme a plus d'une corde à son arc.
Il suggère à travers ses productions un nouveau langage pour le shangaan en tant que genre musical : en remplaçant la guitare et la basse jouées live par les sons de synthétiseurs Casio réglés sur le preset marimba, en les calant sur des boîtes à rythmes palpitant à plus de 180bpm, il propose une musique qui déferle frénétiquement sur l'auditeur et invite à remuer son postérieur à des vitesses démentes, s'invitant dans la vague mondiale des musiques de dancefloor plus-rapide-que-moi-tu-meurs, du Kuduro au Uk Grime en passant par le Baile Funk.
La musique rappelle également par moments la fin des 70's/début des 80's à New-York, quand la pop prenait des inflexions africaines, s'appropriant le punk et le dub. On pourra penser aux productions d'Arthur Russell, ou à celles du Brian Eno et David Byrne au temps des Talking Heads, elles-mêmes fortement influencées par une écoute attentive de musique traditionnelle africaine.
Il semble que l'intense circulation des flux musicaux à l'échelle mondiale évoquée ici vienne contredire, d'une certaine manière, les théories réactionnaires évoquées en début d'article. Et il n'est finalement pas étonnant que la dance afro-futuriste Shangaan semble célébrer un certain retour à la tradition via l'usage de nouvelles technologies, et celui d'un minimalisme amplifié qui résonne à travers tous ces paysages sonores.
Le 22 juin, donc, on pourra venir se décrocher les hanches à Grnd Gerland en compagnie de Nozinja l'entremetteur et chanteur, des intrigants clowns-danseurs les Tshetsha Boys (voir vidéo), de certains des danseurs Shangaan les plus rapides et du producteur de kwaito/house et complice de Dog, DJ Spoko.
C'est pas vraiment un concert habituel pour le lieu, alors on est bien excités comme des puces de vous proposer cette date.
(largement inspiré de la chronique du disque parue dans le numéro d'août 2010 de Wire, excellent périodique anglais évoquant les musiques intellectuelles et sophistiquées. )
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Une petite démonstration de danse des Tshetsha Boys :
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L'un des gros tubes parmi les tubes de la compilation :
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La page du label concernant le disque, avec une explication de Nozinja (en anglais) : http://www.honestjons.com/label.php?pid=36711L’Agence Acapulco présente :
Une soirée rebord de piscine, panaché et pincement au cœur.
Ducktails
Ducktails c’est un solo de pop lofi distordue, doucement répandue par Matt Mondanile, qui joue également dans Real Estate. Il a sorti plein de morceaux sur plein de label momentum (Not Not Fun, Old English Spelling Bee, Fuck It Tapes, Woodsist...) et a connu son apogée média en collaborant avec Panda Bear sur un des morceaux de son dernier disque. Après des débuts expé un peu plus psyché, il semble se dédier en ce moment à déverser continuellement une espèce de chaleur ouatée dans nos oreilles fragiles, entre un mélange caramel/fruits de la passion et la conviction toute confucéenne que si l’on tombe, c’est pour mieux se relever.
Ducktails – Killing The Vibe Merci Panda Bear pour les nananananaaaaa !
C’est parfaitement naïf, chaloupé et brumeux, comme l’idée que l’on pourrait se faire d’un séjour sur une île tropicale à l’avant-veille d’une pandémie végétale généralisée.
Ducktails – Don’t Make Plans
Ducktails – Hamilton Road
Ducktails – Beach Point Pleasant
Julian Lynch
Julian Lynch est un jeune chercheur en ethnomusicologie et la moitié de Ducktails à ses tous débuts. Ce qui se traduit dans sa musique assez logiquement : on retrouve la distorsion lofi, les percussions étouffées et la fascination pour les rivages oniriques de Ducktails. Mais avec en plus des instruments à vents exotiques et des mélodies aériennes, entre la stratosphère et le sommeil paradoxal.
Big Troubles