Exposition de panos. Collection rassemblée par Reno Leplat-Torti
« L’art du Paño, diminutif de pañuelo, mouchoir en espagnol, s’est développé dans les prisons du Sud-Ouest des États-Unis dans les années 40s à la faveur du Pachuco Movement. Zoot-Suit, Low Rider, Mural, la Virgen de la Guadalupe tatouée dans le dos et la Vida Loca qui coule dans les veines, c’est la première affirmation spectaculaire de l’identité chicano.
Griffées façon tattoo avec l’encre des stylos bille, ces étoffes enluminées véhiculent leur propre code, leur propre technique, transmise d’une génération de détenus à l’autre. Ces dessinateurs autodidactes souvent condamnés à de lourdes peines, puisent leur inspiration dans la sous-culture des gangs latinos de Los Angeles. Ils dépeignent La Vida Loca dans le barrio, symbolisés par le masque de la comédie, le clown gai - Laugh Now – ou celui de la tragédie, le clown triste – Cry Later – et en tirent les conséquences. Les barreaux, l’horloge, le sablier, les chaînes ou les miradors illustrent la vie carcérale, les héros de la révolution mexicaine, la dignité du guerrier et la fierté des origines alors que les Paños couverts de fleurs, de papillons ou de cœurs sont envoyés aux femmes et aux petites amies. Les enfants ont droit à des reproductions de cartoons célèbres, les mères et les grands mères reçoivent les mouchoirs décorés de sujets religieux traditionnels : la Vierge de la Guadalupe, le Christ en croix appelé affectueusement El Chuy, les mains jointes sur la Bible … reflètent le respect en la protection divine et le pouvoir de la rédemption, la foi catholique reste toujours très présente chez les gangmembers de South Central..
En s’emparant des thèmes religieux pour les remixer avec les grosses cylindrées customisées, les symboles aztèques préhispaniques, les armes à feu encore fumantes ou les formes généreuses de la pin-up latina, ces détenus ont inventé sur les mouchoirs fournis gracieusement par l’administration pénitentiaire leur propre façon de communiquer avec le dehors. En dessinant d’impeccables substituts illustrés, seuls cadeaux free hand envoyés à la famille, aux amis, aux amours au-delà des murs d’enceinte, ces artistes de l’intérieur ! préfèreront toujours la vérité du dessin aux mots chuchotés entre deux gardiens dans le vacarme d’un parloir surpeuplé. »
Pascal Saumade pour La Pop Galerie, Juillet 2011
Le livre « PANOS » édité par le dernier cri accompagnera cette exposition.