les concerts c’est bien, mais la littérature aussi ! Afin de célébrer le plaisir et la magie des mots, nous accueillons, jeudi 21 janvier à 20h30, la comédienne Karine Sauter, de la compagnie La femme blanche. Prix libre.
Elle lira le Monologue, de Simone de Beauvoir, un texte dur, sombre et puissant, "un texte où chacun peut se reconnaître comme dans un miroir, car il révèle ce moment qui existe en chacun de nous quand, tout en baissant les bras, nous tenons à faire face à notre déchéance. Alors nous refusons de reconnaître nos fautes et d'assumer nos responsabilités."
Cette courte nouvelle se trouve dans le recueil La femme rompue. La lecture dure un peu plus d’une heure.
Venez vous laisser submerger par la force des mots, du rythme et des images !
Prochain RDV : vendredi 29/01 - L’autopsie a révélé que la mort était due à l’autopsie (concert)
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“J’ai choisi un cas extrême : une femme qui se sait responsable du suicide de sa fille et que tout son entourage condamne. J’ai essayé de construire l’ensemble des sophismes, des vaticinations, des fuites par lesquels elle tente de se donner raison… Pour récuser le jugement d’autrui, elle enveloppe dans sa haine le monde entier. Je voulais qu’à travers ce plaidoyer truqué le lecteur aperçût son vrai visage.”
Simone de Beauvoir
"Ce texte est présenté en lecture pour lui garder sa forme littéraire, et ne pas l’étouffer dans une représentation théâtrale. Son vocabulaire grossier, la haine qui s’y déverse, l’humour qui en ressort se suffisent à eux-mêmes ; il ne semble pas opportun de les surligner en créant un copier-coller scénique de l’univers dans lequel évolue la narratrice."
Quelques extraits:
“ Mais quand il a crevé elle ne s’est plus gênée elle m’envoyait ses bagues à travers la gueule. Pas une fois je n’ai giflé Sylvie. Nanard était le roi. Elle le prenait dans son lit le matin je les entendais se chatouiller il dit que c’est faux que je suis ignoble évidemment il ne va pas avouer ils n’avouent jamais il a peut-être même oublié pour oublier ce qui les dérange ils sont fortiches et je les emmerde parceque je me souviens; elle se baladait à travers son bordel de chambre à moitié à poil dans son peignoir de soie blanche taché et troué de brûlures de cigarettes il se collait à ses cuisses ça lève le coeur les mères avec leurs petits mâles il aurait fallu que je leur ressemble ah non! Je voulais des gosses bien des gosses propres et que Francis ne devienne pas un pédé comme Nanard.”
“ Je fais attention je ne mange que des produits de régime mais il y a tout de même des gens qui les tripotent avec des mains plus ou moins propres ça n’existe pas l’hygiène sur cette terre l’air est pollué pas seulement à cause des autos et des usines mais à cause de ces millions de bouches sales qui l’avalent et le recrachent du matin au soir; quand je pense que je baigne dans leur haleine j’ai envie de fuir au fond du désert; comment se garder un corps propre dans un monde aussi dégueux on est contaminé par tous les pores de la peau et pourtant j’étais saine nette je ne veux pas qu’ils m’infectent.”
“ Je m’amenais avec mes gros sabots leurs grands mots je les leur dégonflais: le progrès la postérité l’avenir de l’homme le bonheur de l’humanité l’aide aux pays sous-développés la paix dans le monde. Je ne suis pas raciste mais je m’en branle des Bicots des Juifs des Nègres juste comme je m’en branle des Chinetoques des Russes des Amerlos des Français. Je m’en branle de l’humanité qu’est-ce qu’elle a fait pour moi je me le demande. S’ils sont assez cons pour s’égorger se bombarder se napalmiser s’exterminer je n’userai pas mes yeux à pleurer. Un million d’enfants massacrés et après? Les enfants ce n’est que de la graine de salauds ça désencombre un peu la planète ils reconnaissent qu’elle est surpeuplée alors quoi? Si j’étais la terre ça me dégoûterait toute cette vermine sur mon dos je la secouerais. Je veux bien crever s’ils crèvent tous. Des gosses qui ne me sont rien je ne vais pas m’attendrir sur eux. Ma fille à
moi est morte et on m’a volé mon fils.”
“ Ca s’est un peu calmé là-haut. Des pas des voix dans l’escalier des portières qui claquent encore leur tam-tam à la con mais ils ne dansent plus. Je vois ça. C’est le moment où on baise dans les plumards sur les divans par terre dans les autos l’heure des grands dégueulis où on recrache la dinde et le caviar c’est immonde j’ai l’impression que ça sent le vomi je vais brûler un bâton d’encens.”
“ C’est elle qui l’a harponné au cours de gymnastique et elle se l’est envoyé crado comme elle était ça n’avait rien de ragoûtant de se la farcir mais avec les hommes qui lui étaient passés sur le corps elle devait en connaître des trucs et des machins c’était le genre à se mettre à cheval sur le mec je la vois d’ici c’est tellement dégueux la façon dont les bonnes femmes baisent.”
“ Le petit Bordelais. On attendait rien l’un de l’autre on ne se posait pas de questions on ne se faisait pas de promesses on se mettait au pieu et on s’aimait. Ca a duré trois semaines et il est parti pour l’Afrique et j’ai pleuré pleuré. C’est un souvenir qui me repose. Ces choses-là ça n’arrive qu’une fois dans la vie. Dommage!”
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