Petite soirée chez moi l’autre jour, je tente un enchaînement osé dans ma playlist : Lightning Bolt/Venetian Snares/Destiny’s Child… Soudain, la copine d’une copine (je me défends un peu, parfois, de mes relations car je suis veul) m’interpelle : “Hé ! mais qu’est-c’que t’as mis ?! enlève ça tout de suite !”. Je lui explique mon adoration profonde pour certaines productions lumineuses de R’n’b qui parviennent régulièrement à sublimer mes compétences sensorielles, mais également intellectuelles… Que la jeune inculte en face de moi réussisse à appréhender, dans l’instant, mon point de vue, là n’est pas la question… “mais c’est de la meeeerde !”. Et oui, des années d’intoxication rock, ündergründ… des heures d’écoutes du catalogue complet de Jarring Effects ont, manifestement, altéré l’objectivité, la lucidité, des meilleurs, parfois…
Je tenterais, ici, une démonstration (extraits à l’appui) du bien fondé de certains brûlots magnifiques, souvent réduits à leur seule fonction commerciale, parmi les milieux que nous nous fréquentons.
Notons, en préambule, que la genèse d’un track de r’n’b, relève d’un genre de post-taylorisme, à savoir une division rationnelle du travail : ainsi, la réussite du morceau repose autant (sinon plus) sur le talent du “producteur” - c’est ainsi que l’on désigne à la fois le compositeur/arrangeur, également réalisateur de l’instrumentation électro ou mixte (mélange d’électro et d’instruments enregistrés) que sur la qualité de l’interprétation.
The Neptunes : good producers… bad boyz ?
Saluons, à ce titre, l’œuvre de ces travailleurs de l’ombre (bien que la popularité de certains réussisse à propulser les meilleurs du genre au rang de superstars : Timbaland, The Neptunes, Rodney Jerkins, Dr Dre…) sans qui certaines héroïnes des temps modernes demeureraient certainement dans l’anonymat, belles et idiotes à la fois…
Débutons avec Rodney Jerkins (aka Darkchild), véritable mercenaire des studios, lui qui signe ses productions “assumée” d’un “daaarkchild” caverneux au début de l’instru, de façon à les distinguer de celles plus “alimentaires” (c’est un peu le problème, au passage de ces cachetonneurs virtuoses, capables du meilleur, 20%, comme du pire, 80%…). Il a travaillé, entre autres, pour Michael Jackson, Britney Spears, Jennifer Lopez, Toni Braxton, Mary J Blige, Whitney Houston et les Spice Girls.
Voici deux de ces plus belles réussites (admirez l’invention dans les rythmiques “visionnaires” et une touche noisy et sophistiquée à la fois) :
Destiny’s Child – Say My Name.mp3
The Neptunes est un duo composé de Pharell Williams (et oui…) et Chad Hugo, évoluant dans un registre davantage hip-hop (Snoop Dogg, ils touchent aussi au rock, si si ! avec bonheur… heu parfois). Quand ils se cantonnent au groove, ça donne souvent des trucs avant-gardistes :
Busta Rhymes W/ Pharrell- Light Your Ass On Fire.mp3
“Britney Spears, ça craint !”. Et oui, ils sont nombreux à ne s’être jamais suffisamment penché sur la question et pour peu qu’on ÉCOUTE le sulfureux Toxic (œuvre d’un autre duo, suédois cette fois-ci, Bloodshy and Avant composé de Christian Karlsson et Pontus Winnberg), le potentiel créatif de ce tube intergalactique éclate au grand jour.
Britney Spears – Toxic.mp3
Bloodshy and Advant rééditent (presque) leur exploit sur le dernier album “Blackout” (et, ce, malgré le petit bidon apparent de la Britney 2007) :
Ne minimisons pas, tout de même, le rôle des chanteuses car les reléguer au rang de vulgaires potiches exhibitionnistes témoigne également de la méconnaissance ambiante… Preuve en est cet acapella des Destiny’s Child (sans la production de Jerkins, cette fois) qui, ma foi, se suffit à lui-même : Beyonce über alles !
Destiny’s Child – Say My Name (acapella)